Communistus

Média communiste pour toute l'Europe

fondé par Michèle Mestre

12/1968 · Le socialisme scientifique algérien · p. 49-50
Sommaire de la brochure
  • Éditorial
  • Une civilisation d'une grande richesse
  • Ibn Khaldoun, précurseur de la science historique
  • Colonialisme et personnalité algérienne
  • Un peuple qui jamais ne renonça
  • Trois dates historiques : le programme de Tripoli, la Charte d'Alger, les documents du 19 juin
  • La reconstruction révolutionnaire du parti du FLN
  • Développement économique et planification
  • L'UGTA et la construction du socialisme
  • Armée nationale populaire, base décisive de la révolution
  • Document : « Notre justice doit-être révolutionnaire au service du peuple et à sa portée »
  • L'Union nationale des femmes algériennes
  • Pour une véritable coopération franco-algérienne
  • L'important développement de la coopération Algérie-URSS
  • L'Algérie au premier rang des luttes anti-impérialistes
  • Une grande admiration pour Marx, Lénine et la révolution d'Octobre
  • Karl Marx en Algérie
  • Lénine et les « Thèses d'Avril »
  • Grande révolution d'Octobre, un événement qui a ébranlé le monde
  • Marxisme et socialisme scientifique algérien
  • L'Union nationale des femmes algériennes

    Dans la République algérienne démocratique et populaire, née au lendemain de l’accession à l’indépendance, l’égalité de l’homme et de la femme s’inscrit tout naturellement dans les lois. La femme algérienne vote, elle est éligible. Elle travaille et s’instruit. Ces droits fondamentaux constituent pour elle la clé de sa promotion.

    La reconstruction du pays, l’édification de la nouvelle société exigent la mobilisation du peuple, de tout le peuple. La participation féminine à cette œuvre immense est donc une nécessité vitale.

    Conscient au plus haut degré de cet impératif, le Parti du Front de libération nationale développe ses efforts en vue d’associer la femme algérienne « d’une manière pleine et entière à la gestion des affaires publiques et au développement du pays » (Programme de Tripoli).

    Grâce à l’action persévérante du Parti, l’égalité politique de l’homme et de la femme s’est concrétisée et affirmée lors des élections communales de 1967. La participation des femmes à l’organisation et au fonctionnement des Assemblée populaires communales constitue une étape importante, parce que très concrète, de la reconnaissance de la personnalité féminine.

    Mais il serait vain de parler de l’intégration de la femme algérienne dans la société nouvelle, si on ne lui donnait pas les moyens, les armes qui lui permettront d’employer efficacement son énergie. Ces moyens, ces armes, ce sont l’éducation, l’instruction, la formation professionnelle.

    Le peuple algérien a hérité du colonialisme français cette plaie qu’est l’analphabétisation. En 1962, 92 % des femmes d’Algérie étaient analphabètes. C’est pourquoi l’alphabétisation, véritable problème de base, est un souci majeur du FLN qui a fait de 1968 « l’année de l’alphabétisation ». Un des buts pour le proche avenir est la création d’emplois réservés aux femmes, et ce malgré l’important chômage masculin. Le taux d’emploi féminin est actuellement de 10 %. Il doit atteindre les 20 % dans le cadre du Plan. Le FLN insiste sur le fait qu’il existe des domaines tels que l’enseignement, la santé, vers lesquels la femme algérienne pourra être dirigée dès l’âge scolaire.

    Des femmes instruites, c’est une garantie pour le progrès de demain. Mais pour le Parti du FLN, la femme ne doit pas être instruite uniquement pour tenir sa place dans la production. L’instruction a aussi pour but de la libérer plus profondément encore. Ainsi, sa propre participation à la vie politique du pays sera bien meilleure, plus efficace et contribuera au renforcement global de la construction du socialisme.

    À l’heure actuelle, le Parti élabore un Code de la Famille qui protégera la femme et aidera à un meilleur épanouissement de sa personnalité. Lutte contre les mariages précoces des jeunes Algériennes, contre la tradition de la dot, contre les répudiations et les abandons toujours fréquents et enfin pour la suppression des survivances de la polygamie : tels sont les principaux objectifs de ce code.

    Parallèlement, le Front prépare un projet de planning familial. Projet qui vise deux buts essentiels : protection de la femme contre les grossesses nombreuses et rapprochées, protection de la nation tout entière contre un accroissement trop rapide de la population.

    La femme algérienne, par son éveil, doit être engagée sur tous les plans. Son action dans l’Algérie révolutionnaire ne peut être que révolutionnaire. C’est pour soutenir cette action que le FLN s’est attaché à donner aux femmes algériennes leur propre organisation. Celle-ci, instrument efficace de leur émancipation, est l’Union nationale des Femmes algériennes.

    L’Union nationale des femmes algériennes (UNFA), organisation révolutionnaire féminine

    L’Union nationale des femmes algériennes, partie intégrante du Front de libération nationale, est le porte-parole de la femme algérienne, garant de ses droits et de ses devoirs envers la société socialiste.

    Organisation révolutionnaire, l’UNFA a ses propres structures qui doivent lui permettre une action efficace tant dans les domaines politique, économique que social et éducatif. À la différence du Parti, l’UNFA est une organisation de masse. En relation permanente avec le Front, elle collabore aux travaux de certaines commissions du Parti à l’échelle nationale. C’est ainsi qu’elle a participé à la discussion et à l’élaboration du Code de la Famille.

    Bien qu’à l’heure actuelle, les femmes organisées en son sein soient encore peu nombreuses. L’UNFA s’attache patiemment à les regrouper. [50] Son but et son rôle sont définis par ses statuts : organiser les femmes dans les villes et les campagnes en vue de leur intégration dans la société, libérer les énergies féminines et employer ce potentiel à l’édification du socialisme, association de l’homme et de la femme dans la famille et dans la société.

    Organisation révolutionnaire, l’UNFA porte l’essentiel de ses efforts vers les masses les plus déshéritées, les plus accessibles à saisir l’importance de son action pour une pleine libération de la femme algérienne.

    De ce fait, ce sont les paysannes les plus pauvres qui forment la majorité de la base de l’Union. En majorité analphabètes, elles ont pourtant compris qu’elles ont tout à attendre de cette organisation. C’est ainsi que les plus fortes représentations féminines dans l’UNFA proviennent présentement des territoires du Sud algérien. Dans la seule petite ville de Tindouf, à 1 500 km au sud-ouest d’Alger, il y a plus d’adhérentes à l’UNFA que dans la capitale de l’Algérie où le sort des femmes est indiscutablement meilleur.

    Au cours d’un séminaire tenu récemment à Oran, Mme Belthar, coordinatrice de l’UNFA déclarait :

    « Depuis 1830, nous savons que les Algériennes ont chaque fois participé activement aux insurrections nombreuses et répétées qui ont dressé l’Algérie contre l’occupation française. Mais c’est essentiellement la lutte armée déclenchée le 1^er^ novembre 1954 qui va relever sur une grande échelle le potentiel révolutionnaire constitué par les réserves féminines.

    « L’organisation des femmes musulmanes algériennes, qui avait à l’époque pour mission principale, la revendication de l’indépendance, fut dissoute le 1^er^ novembre 1954.

    « La participation de la femme algérienne à la lutte de libération a créé des conditions favorables pour briser le joug séculaire qui pesait sur elle et l’associer d’une manière pleine et entière à la gestion des affaires publiques et au développement du pays.

    « Dès 1962, au lendemain même de l’indépendance, l’UNFA vit le jour et entreprit de se définir et de se structurer. Malheureusement, les trois années qui suivirent furent marquées par un échec qui dévoila les hésitations et les faiblesses de l’Union ».

    Ces faiblesses, Mme Belthar les résume alors ainsi :

    « --- Manque de coordination entre le sommet et la base ; cette carence a provoqué l’anarchie et le travail fonctionnel ; des comités UNFA ont vivoté, ont essayé de subsister chacun à sa manière.

    « --- Manque de programme d’action défini de structures solides nécessaires à la création d’une organisation véritable.

    « --- Manque de direction représentative, la désignation de comités dirigeants n’ayant jamais été soumise à l’approbation de la base.

    « --- Manque de soutien effectif, l’UNFA étant livrée à elle-même, sans appui et sans moyens financiers »1.

    Le 19 juin 1965 a marqué une étape décisive dans la vie de l’Algérie et particulièrement dans celle de l’UNFA C’est ainsi que pour cette dernière, le Congrès qu’elle a tenu en novembre 1966, lui a permis de donner un nouvel élan à son action d’émancipation des femmes et de participation effective à la construction du socialisme.

    Organisation révolutionnaire, l’UNFA apporte son importante contribution à l’action commune des organisations féminines progressistes contre l’impérialisme et le néocolonialisme. C’est ainsi que conformément aux options socialistes de l’Algérie, elle se retrouve aux côtés des femmes des pays socialistes dans la Fédération démocratique internationale des femmes.

    L’Algérie socialiste est un des éléments moteurs de la Révolution sur le continent africain et au sein de la nation arabe. Tout naturellement, l’UNFA milite à la Conférence des Femmes africaines et dans l’Union des Femmes arabes.

    Organisation révolutionnaire, l’UNFA soutient tout particulièrement les héroïques femmes vietnamiennes, les résistantes de Palestine, les femmes des ghettos noirs des USA et les combattantes des maquis de l’Amérique latine.

    En Algérie même, l’UNFA milite aux côtés des soldats de l’Armée nationale populaire. Ainsi en juin 1967, lors de l’agression sioniste contre les peuples arabes, répondant aux directives de l’Union, des jeunes filles et des femmes s’intégrèrent à la mobilisation du peuple. De même, quelques semaines plus tard, l’UNFA participa à l’encadrement des étudiantes mobilisées dans l’ANP.

    Libérer la femme algérienne de toutes les traditions rétrogrades. Lui donner sa place, toute sa place dans l’Algérie socialiste

    L’évolution et l’épanouissement de la femme et de sa personnalité propre nécessitent de résoudre dans la pratique une véritable mutation, dans les mœurs. Pour cela, une lutte permanente contre les préjugés sociaux et les croyances rétrogrades est un impératif absolu. En effet, les freins à la promotion complète de la femme sont multiples. La domination féodale, puis coloniale, avaient provoqué un repli sur soi de la femme algérienne, qui était en somme une réaction d’auto-défense. On n’efface pas des siècles de domination par un simple coup de baguette magique.

    Par ailleurs, si la promotion de la femme algérienne se fait encore lentement, la responsabilité en incombe, pour une grande part, à la mentalité et à l’attitude très souvent négatives de beaucoup d’hommes. Ceux-ci, en effet, refusent encore de voir dans les femmes leurs égales. Ils lui dénient le droit d’assumer une tâche, de remplir un rôle, si minimes soient-ils, dans la construction de la société nouvelle, que ce soit sur le plan économique, social ou politique. Ils maintiennent des interdictions et des tabous issus d’un passé révolu.

    La femme algérienne a, en de multiples occasions, fait la preuve de sa combativité pour une vie meilleure. Elle saura nécessairement triompher des obstacles qui barrent encore la route de sa complète libération. Son action propre, son action révolutionnaire, conjuguée aux efforts résolus et persévérants des organisations de la Révolution socialiste algérienne, lui permettront d’avancer sûrement dans cette voie.

    Footnotes

    1. El Moudjahid, 19-20 mai 1968.