Sommaire de la brochure
La reconstruction révolutionnaire du parti du FLN
L’Algérie socialiste a proclamé l’année 1968, année du Parti. La reconstitution révolutionnaire du Parti du FLN, appelée aussi restructuration, s’opère en profondeur.
Il en résultera une mutation profonde. Une mutation destinée à faire du Parti du FLN, l’instrument décisif de la construction du socialisme en Algérie.
Dans le long et incessant processus de sa construction, la réorganisation actuellement en cours, s’inscrira sans nul doute comme une étape décisive, dans le regroupement de l’avant-garde révolutionnaire algérienne.
La construction du Parti est un processus continu
La construction du Parti révolutionnaire a toujours été, à toutes les époques et sous toutes les latitudes, le fruit d’une pratique révolutionnaire continue et incessante.
Le rythme de cette construction subit des variations. Il y a des paliers, il y a des bonds en avant. Il peut y avoir des ruptures brutales avec des pratiques conservatrices ou gauchistes trop longtemps maintenues. Il peut même y avoir des changements ou des modifications d’appellation. Cependant c’est toujours de la construction du Parti révolutionnaire qu’il s’agit.
Cette action permanente de construction du Parti est étroitement conditionnée, soit par les diverses phases de la lutte pour le renversement de la bourgeoisie ou du colonialisme, soit par les diverses étapes de la construction du socialisme.
En Algérie, le peuple devait à la fois chasser l’impérialisme colonisateur et se préparer à assurer lui-même l’exercice du pouvoir.
L’actuel Parti du FLN est issu du Front de libération nationale qui, ayant groupé en son sein au cours des huit années de guerre, toutes les forces anticolonialistes du pays, conduisit le peuple algérien à la victoire.
Dès l’indépendance, le Front de libération fut proclamé Parti du FLN.
La mutation du Front en un Parti capable d’œuvrer à la construction d’un État indépendant et à la mise en place des premières bases du socialisme nécessita une longue, persévérante et parfois très difficile action de transformation et de réorganisation. Le congrès de fondation du Parti du FLN ne devait se tenir qu’en avril 1964 près de deux ans après l’accession à l’indépendance.
Les séquelles de la domination colonialiste pesaient encore lourdement sur le jeune État révolutionnaire. La résolution finale du congrès de fondation confirme que ces séquelles étaient encore loin d’être liquidées puisqu’en tête des tâches fixées à ce moment au Parti figurent la nécessité de compléter l’indépendance sur tous les points, l’évacuation rapide des forces militaires étrangères, l’algérianisation totale de l’administration, la reprise en main des richesses nationales, l’arabisation de l’Algérie, l’arabisation de l’enseignement.
Cependant, dans l’accomplissement de ses tâches, le Parti se heurta à un obstacle majeur. Privée de toute forme d’État par cent trente années de colonialisme, l’Algérie nouvelle se devait de construire de fond en comble un État correspondant à ses options socialistes. Le vide créé dans le domaine de l’État après l’effondrement de la domination colonialiste suscita chez de [28] nombreux dirigeants algériens de profondes erreurs, parfois des trahisons qui furent évidemment entretenues et utilisées par les ennemis de tous bords de l’Algérie indépendante.
Il fallut l’action de l’ANP et du Conseil de la Révolution en juin 1965 pour qu’une véritable construction de l’État puisse être entreprise et que l’édification du socialisme puisse commencer à se réaliser d’une façon planifiée, scientifique.
Aujourd’hui, la construction de l’État est en bonne voie. À partir des Assemblées populaires communales (APC), élues en mars 1967, la mise en place d’Assemblées régionales et d’une Assemblée nationale, réellement représentative de l’ensemble du peuple, peut être envisagée dans des délais rapprochés.
Sur le plan économique et social également de grands pas en avant ont eu lieu depuis le 19 juin 1965.
La réorganisation du secteur autogéré pratiquement limité à l’agriculture, la nationalisation des moyens financiers, l’aide aux petits paysans et aux régions déshéritées, le relèvement des salaires les plus bas, l’implantation de nouvelles unités industrielles, l’utilisation rationnelle et la reprise en main de plus en plus accélérée des richesses pétrolières, voici quelques-uns des récents progrès accomplis à partir desquels la construction du socialisme est maintenant abordée à un niveau supérieur.
Du fait même que s’ouvrent de nouvelles perspectives dans l’édification du socialisme, des tâches nouvelles et fondamentales s’imposent au Parti du FLN. Il doit devenir un Parti qui impulse, à tous les niveaux, les instances politiques, économiques et administratives de la nation ; il doit être le principal instrument de l’édification du socialisme et le moteur des prochains progrès.
Comme on le voit, dans l’Algérie socialiste, construction du Parti et construction de l’État sont intimement liées, étroitement dépendantes l’une de l’autre.
Le président Boumediene ne déclarait-il pas lui-même d’ailleurs dans une récente interview : « L’État et le Parti se confondent puisque nous vivons sous le régime du Parti unique. »
Pourquoi un Parti unique ?
La Charte d’Alger adoptée en avril 1964 par le premier Congrès du Parti du FLN précise les raisons fondamentales qui conditionnent l’existence d’un Parti unique, en Algérie.
Il convient de reproduire ici ce passage important de la Charte d’Alger.
« Le Programme de Tripoli qui sanctionne le choix du Parti unique répond à la volonté profonde des masses laborieuses soucieuses de préserver les acquis de la guerre de libération et d’assurer la continuité de la révolution.
En recouvrant l’indépendance, les combattants et le peuple avaient perçu le danger qu’il y avait à se dessaisir de la vigilance de l’époque de la lutte armée en laissant le terrain libre aux jeux néfastes du multipartisme à travers lesquels les forces du capital et de la réaction, les ennemis du peuple finissent par mettre la main sur le pouvoir économique.
Le multipartisme n’est pas un critère de la démocratie ni de la liberté. Il correspond à une certaine étape du développement de la société divisée en classes opposées et de l’hétérogénéité de chaque classe et constitue une réponse que cette société invente pour faire face à ces contradictions et, sans les résoudre, les atténuer et tenter de les intégrer.
Le multipartisme dans le cadre d’un régime capitaliste n’est possible qu’à partir du moment où les intérêts fondamentaux des classes dirigeantes sont assurés contre tout risque grave. C’est le secret de la démocratie bourgeoise. Dans ces conditions, le multipartisme permet à tous les intérêts particuliers de s’organiser en différents groupes de pression visant à faire échec à l’intérêt général, c’est-à-dire à l’intérêt des travailleurs. Cette dispersion non seulement empêche l’effort collectif, mais encore crée un terrain favorable à la prolifération de faux problèmes et aux manœuvres de ceux qui voient dans la société nouvelle la fin de leurs privilèges.
Dans les pays engagés dans la voie du développement socialiste, le multipartisme érigé en principe de démocratie politique peut avoir pour signification de favoriser les difficultés objectives qui rendent plus aisées que partout ailleurs les mystifications collectives, la démagogie, l’entretien de mécontentements artificiellement gonflés et l’irresponsabilité sociale. Les groupes de pression étrangers voient facilitées leurs possibilités d’intervention et leurs manœuvres tendant à paralyser les mesures qui vont à l’encontre de leurs intérêts d’exploiteurs.
L’option pour le parti unique ne suffit pas à engendrer un pouvoir d’essence révolutionnaire immunisé contre toutes les déformations.
Si le multipartisme dans les conditions de l’exploitation assure le maintien “démocratique” du pouvoir par le capital, le parti unique, présente lui, un danger --- d’un autre ordre et non moins grand --- la confiscation du pouvoir révolutionnaire au profit d’une caste.
Le choix du parti unique doit se faire dans une clarté et une précision qui éliminent toute équivoque quant à ses objectifs, ses composantes sociales et le principe de son fonctionnement.
Faute de quoi les risques sont grands de déboucher, tôt ou tard, soit sur une dictature petite-bourgeoise soit sur la constitution d’une couche bureaucratique faisant de l’appareil l’instrument de ses intérêts particuliers, soit enfin sur un régime de dictature personnalisée faisant du parti un simple organe de police politique. »
Le rejet du multipartisme par l’avant-garde révolutionnaire algérienne, qui a joué le rôle déterminant dans la destruction du colonialisme français, s’est donc fait dans la clarté la plus totale. De même, le ralliement au principe du Parti unique a été décidé avec toute la clairvoyance politique voulue.
Après la victoire sur le colonialisme, l’alliance de toutes les tendances politiques et sociales opposées à celui-ci avait fait son temps.
« Son maintien, dit encore la Charte d’Alger, s’identifierait à la recherche de la confusion et du compromis malsain. Les problèmes nouveaux ont fait surgir des contradictions internes irréconciliables. »
Ces contradictions étaient l’expression des antagonismes de classe qui ne pouvaient pas ne pas se manifester au moment où de la lutte pour l’indépendance nationale, le peuple algérien passait à la lutte pour la construction du socialisme.
Le Parti d’avant-garde même quand il se dénomme encore --- compte tenu du passé et de la tradition révolutionnaire --- « Front de libération nationale » ne peut être le champ clos où s’affrontent les contradictions de classe.
Le Parti d’avant-garde est socialement le Parti du peuple, c’est-à-dire plus précisément celui de la partie la plus exploitée du peuple, de la partie la plus révolutionnaire du peuple.
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En Algérie, cette partie c’est d’abord la paysannerie, les paysans dépossédés par le colonialisme et dont on sait le rôle révolutionnaire qu’ils ont joué pour la libération de leur patrie.
Quant à la classe ouvrière des villes, comment n’aurait-elle pas le même Parti que la paysannerie révolutionnaire ?
Ceux qui ont prétendu maintenir le Parti communiste algérien sous prétexte qu’il était le « parti de la classe ouvrière algérienne » et que cette classe avait besoin de son propre parti ont démontré par là, non seulement leur manque de liaison véritable avec la réalité algérienne et leur irresponsabilité, mais aussi que leur but était de perpétuer les divisions que le colonialisme français avait créées au sein même du peuple travailleur, divisions que l’impérialisme, malgré son échec, aurait bien voulu perpétuer.
Le Parti unique s’est imposé en Algérie comme une nécessité historique. Nul ne peut et ne pourra le remettre en cause.
Reconstruire le Parti de la base au sommet
Les progrès accomplis dans le domaine de la réorganisation de l’État et de l’économie permettent et imposent à la fois au Parti du FLN une action de réorganisation qui aboutit à une véritable reconstruction révolutionnaire de la base au sommet.
Reconstruction révolutionnaire en effet, car son objectif est de former un Parti qui sera l’œuvre même des meilleurs éléments du peuple et dont la composition en fera une véritable formation révolutionnaire d’avant-garde.
Les directives pour la réorganisation du Parti furent rendues publiques le 24 janvier 1968.
La première phase de leur application consista en une vaste campagne d’explication destinée non seulement aux militants du Parti, mais à l’ensemble de la population.
Elle fut menée sur les thèmes du « retour à la base » et de la « restructuration ».
Retour à la base en faisant reposer la reconstruction du Parti sur le peuple lui-même.
Restructuration par la remise en cause de l’appartenance de tous les adhérents actuels et la recherche de nouveaux militants authentiquement révolutionnaires que le Parti avait été jusqu’ici incapable d’intégrer.
Village après village, quartier après quartier, région après région, les responsables de la réorganisation allèrent expliquer la nécessité de la restructuration du Parti et discutèrent avec les paysans, les ouvriers, les artisans, des moyens envisagés pour la réaliser.
« La base c’est le Peuple. Le Peuple c’est vous » titrait l’organe du FLN El Moudjahid du 1^er^ février 1968 en lançant la campagne d’explication.
La seconde et la troisième phase de la réorganisation ont vu la mise en place des commissions de contrôle qui, à tous les échelons, ont procédé à l’opération adhésions-réadhésions. Constituées au niveau des départements et régions puis des kasmas et cellules, elles ont eu pour tâche l’examen des dossiers d’adhésion et de réadhésion.
C’est dans le même esprit de liaison avec le peuple, de consultation permanente de la base, de débats entre dirigeants et militants qui avait dominé la campagne d’explications que sont mises au point les structures, les méthodes de travail et la composition des commissions de contrôle.
Au fur et à mesure que se développent ces premières phases de la réorganisation apparaissent de nouveaux cadres ou se révèlent des militants de valeur qui jusqu’ici n’avaient pu faire leurs preuves.
Les équipes de dirigeants chargées de la réorganisation s’étoffent et se complètent de la base jusqu’au plan national.
L’examen des questions posées par la restructuration s’est accompagné toujours plus fréquemment, de discussions et de décisions concernant les divers problèmes de la construction du socialisme et de la défense de la nation.
Parallèlement à sa propre reconstruction, le FLN tend, de plus en plus à orienter et aider celle des diverses organisations nationales : Union générale des travailleurs [30] algériens, Jeunesses du FLN, Union nationale des femmes algériennes, organisations de loisirs, etc.
Tout en avançant dans le sens de sa propre transformation révolutionnaire, le Parti n’a cessé d’affirmer sa capacité à jouer le rôle dirigeant dans l’ensemble des activités de l’Algérie socialiste.
D’autres phases de la réorganisation sont prévues : élections de nouveaux organismes dirigeants dans les kasmas et les cellules, congrès aux divers échelons et enfin Congrès national qui marquera la phase culminante de la reconstruction révolutionnaire du Parti.
Suivant la formule, fréquemment citée par la presse algérienne : « C’est en forgeant qu’on devient forgeron ». Au travers de la mise en place des structures de la restructuration du Parti, c’est la préfiguration du Parti restructuré et transformé qui apparaît.
Le rôle révolutionnaire de la JFLN
Au lendemain de l’indépendance, la JFLN se créa spontanément en prolongement de la lutte héroïque menée par la jeunesse algérienne pendant la guerre de libération.
Les difficultés que connut le Parti du FLN dans cette période critique où l’Algérie était encore fortement soumise aux pressions du néocolonialisme ne lui permirent pas d’aider vraiment la JFLN à devenir l’organisation structurée et influente capable d’orienter l’ensemble de la jeunesse algérienne dans la construction du socialisme.
Aujourd’hui, l’édification d’une organisation révolutionnaire de la jeunesse algérienne est menée de pair avec l’action pour la transformation révolutionnaire du Parti du FLN.
Au sein des divers organismes qui, à tous les échelons, animent la réorganisation du Parti, la JFLN est représentée et une importante partie de leur activité est consacrée au problème du renforcement et de l’implantation de la JFLN dans l’ensemble du pays.
Voici comment le responsable du Parti, Kai Ahmed définissait le rôle révolutionnaire de la JFLN en avril 1968 au cours d’un séminaire des cadres de cette organisation dans le département de Tiaret :
« C’est une avant-garde de la jeunesse qui doit regrouper les meilleurs des meilleurs jeunes Algériens, ceux qui viennent du lycée, de la ferme, de l’usine, du bureau, ceux qui donnent l’exemple des vertus algériennes, qui donnent l’exemple dans la recherche de l’amélioration dans le travail.
« C’est à partir de ce noyau que la JFLN existe et constitue une organisation de jeunesse d’avant-garde.
« Sur le plan politique, la JFLN est une jeunesse politique et ses éléments sont les pionniers de la Révolution, ils constituent une génération qui doit prendre la relève du pouvoir à tous les échelons. »
La jeunesse, pour entrer massivement dans l’action révolutionnaire, doit se sentir mobilisée par une grande cause. La construction du socialisme en Algérie en est une, mais il en est aussi une autre : nous voulons parler de la destruction de toute présence impérialiste, de toute présence sioniste dans les pays arabes.
C’est à la jeunesse algérienne que revient particulièrement la responsabilité de mener ce combat et c’est pourquoi la direction du Parti du FLN attache une telle importance à ce que la JFLN soit à l’avant-garde du combat contre le sionisme et l’impérialisme.
Ici, il convient de mentionner l’importante décision que la JFLN a prise à l’occasion du 9^e^ Festval mondial de la Jeunesse à Sofia.
La JFLN avait décidé qu’elle ne pourrait participer au Festival si une délégation israélienne y était présente. Au cours de la réunion des jeunesses des pays arabes précédant le Festival, cette position fut ratifiée à l’unanimité. Cette position de principe contre le principal ennemi des peuples arabes, contre celui qui a dépossédé le peuple palestinien de sa patrie resta jusqu’au bout celle de la JFLN.
Les organisateurs de Sofia ayant finalement accepté la représentation d’une délégation de l’État fantoche israélien, le JFLN ne se rendit pas à Sofia. ET, fait combien important, des réunions eurent lieu dans les principales villes d’Algérie pour expliquer les raisons de ce refus de participation.
La reconstruction révolutionnaire du Parti du FLN est une étape importante dans le processus de développement du socialisme en Algérie.
C’est une mutation que la vie a imposée à l’Algérie, mais elle a aussi certainement une valeur d’exemple pour de nombreux États engagés eux aussi, dans la construction du socialisme et pour les peuples qui ont encore à prendre le pouvoir.
Tout n’a pas été dit, tout n’a pas été fait en ce qui concerne la construction du Parti.
La construction du Parti révolutionnaire d’avant-garde est, comme nous l’avons déjà dit, un processus continu.
L’avant-garde révolutionnaire algérienne a entrepris une grande tâche dont les résultats seront d’une extrême importance, non seulement pour l’Algérie, mais aussi pour tous les peuples engagés dans le combat pour vaincre l’impérialisme et bâtir la société socialiste.